Un train nommé souvenir
Scrogn | 7 mai 2009La lecture d’un bon petit blogue de derrière les fagots a eu le don de me rappeler une petite scène à laquelle j’ai assisté, il y a quelques années.
S’il est un lieu où l’observation de nos semblables est enrichissante, c’est bien le hall d’une gare, surtout quand votre train a du retard. Aussi, pour patienter,  je laissais mon regard errer sur la foule qui s’amassait en ce lieu, passablement pressée et un tant soit peu agacée des ralentissements ferroviaires.Â
Ce jeune homme qui embrassait distraitement sa petite amie tandis que celle-ci le dévorait des yeux avec une intensité douloureuse. Ce père exaspéré qui tentait de gérer sa marmaille déchaînée, tentant de sauvegarder les derniers vestiges de son sang-froid à coups de sourires gênés .  Cette vieille dame qui refaisait pour la sixième fois l’inventaire de son cabas à l’agonie en marmonnant d’un air furieux. Et tous ces gens qui couraient, sans se voir et sans s’entendre. Puis, je la vis.
Une petite fille qui n’avait pas encore atteint l’âge de raison et qui semblait avoir perdu la sienne, toute rousse dans un manteau vert. Plantée dans la jungle de la gare, elle pleurait à gros bouillons, les deux mains crispées sous son menton. Autour d’elle, la faune s’agitait, ne lui accordant aucun regard, les yeux rivés sur le tableau d’affichage et sur son nombril.
Finalement, une jeune fille de dix-sept ou dix-huit ans s’approcha de la petite :
– Que t’arrive-t-il, ma chérie ? Tu es toute seule ? Où sont tes parents ?
 L’enfant leva des yeux inondés vers cette inconnue secourable et hoqueta lamentablement qu’elle avait perdue sa maman.
– Ne t’inquiète pas, nous allons la retrouver très vite. Viens avec moi, nous allons demander à la dame de la gare de d’appeler ta maman avec le haut-parleur. Tout ira bien.
La jeune fille saisit doucement la menotte encore potelée et entreprit de fendre la foule laborieusement pour atteindre le comptoir d’accueil. Mais au fur et mesure que ce convoi spécial s’acheminait, un changement pour le moins étrange s’opéra. Alors que la gamine se calmait, la grande sentit ses yeux picoter. Bientôt, les joues de l’une ruissellaient de larmes tandis que le visage de l’autre arborrait un air de plus en plus éberlué.Â
Enfin, les deux commères atteignirent l’accueil sauveur. La jeune fille sanglotante désigna alors l’enfant abasourdie et parfaitement consolée à l’employée des chemins de fer. Tentant de maîtriser les torrents salés qui s’échappaient de ses yeux, la pleureuse réussit à balbutier « maman » puis « perdue ».
La préposée se pencha par-dessus le comptoir pour évaluer la situation et demanda :
– Laquelle d’entre vous cherche sa maman ?
Ça m’a drôlement vexée d’être ainsi critiquée sur ma solidarité lacrymale…
Oups ?
Bon, on va faire comme si je n’avais rien raconté…
Au contraire, ça prend bien des larmes pour arroser les jardins du bonheur.
à la découverte de ce blog, au milieu des éclats de rires, des larges sourires, j’entrouvre votre tiroir à émotions.
je l’aime bien aussi, et y glisse un mouchoir, que je sortirai si besoin ! 🙂
Très joli et trop mignon 🙂 !!! (merci pour le lien chère Madame)
Moukmouk et koalamoureuse : z’avez gagné : mes écluses lacrymales sont ré-ouvertes grâce à vos gentillesses et vos délicieuses formules ! 🙂
Ophise, Ophise, Ophise, nul besoin de me remercier ! Ton si joli blog me ravit ! D’ailleurs, j’attends le prochain billet… 😉